Douce campagne – 2ème partie – Oclide

La plus grande partie du lendemain est studieuse, nous naviguons de réunion en réunion – joie du télétravail- avant de profiter du week end. Seul le collier, invisible en téléconférence, me fait sourire par intermittence. Pause du midi, la température estivale nous accueille sur la terrasse, propice au badinage. Au dessert, je rejoins son réconfort où il dépose une main sur mon ventre. Les contractions démontrent la réceptivité débordante. Pics d’énergie à l’état brut. Je suis prête pour la suite.

– Viens avec moi, me prenant par la main jusqu’au jardin fleuri, m’annonce t il.

– Enlève ta robe. Muette, j’obéis avec appréhension. Et ton string.

Nue.

Exposée, vulnérable, angoissée.

– Tu vas rester ici, ne bouge pas.

Il rejoint la maison, me laissant seule avec moi même, avec ce corps trop jugé, à la vue du monde entier. Bien que mes pratiques précédentes m’ont amenées à me mettre à nue, à m’exposer avec exubérance frisant souvent le ridicule, cette nouvelle expérience me procure une sensation étrange. Étonnant où se situent les limites de chacun. Bouleversée par la honte, la fragilité, je ne sais que faire.

C’est une véritable rencontre avec moi même, finalement. Je ferme les yeux, sévère, pour ne pas changer. Respire. Respire. Ferme les yeux. Accueille. Mon mantra universel.

Je parviens à distinguer le vent sur ma peau, les rayons du soleil chatouilleux, les insectes qui voltigent, même l’odeur des arbres. Une esquisse de sourire aux lèvres. Fragile victoire, mais j’accepte. J’accepte d’évoluer dans l’espace, prenant ma place dans cette nature. Certes, la frontière est tenue.

Mon Maître me racontera plus tard, qu’il m’observait de la maison, guettant mon trouble, me photographiant, conscient de ma propre montagne à gravir. 

Mais à cet instant, les graviers crissent sous ses pas m’indiquant son retour. Les rôles sont définis.

– A genoux, j’ai envie de pisser. Un pas supplémentaire franchi, où je termine, ruisselante, un papillon posé sur mon épaule.

Fin de séance.

Après les dernières heures devant notre ordinateur, le week end nous appartient. Avec son protocole.

Il m’avait annoncé la teneur du contrat : chaque jour à partir de 11h et ce, toutes les trois heures, je serai fouettée quoique nous fassions. Cette règle vise à ponctuer ma journée ainsi que mon état d’anxiété. Même sans accès à l’heure, une sorte d’horloge interne se met en place. Mon cerveau calcule le temps qu’il reste avant les prochaines paroles fatidiques : 

– C’est l’heure, Oclide.

Une trentaine d’impacts pour l’ouverture du cérémonial, suspendue à la poutre de la terrasse. Après l’envie vient la réalité et donc, sans compromis possible, je subis l’assaut, la limite se rapprochant dangereusement. Cette offensive directe me déstabilise, il faut que je puise dans mes réserves. Ce fonctionnement mécanique, ritualisé détraque mon assurance.

Une demi heure plus tard, mon Maître me détache :

– Tu vas t’habituer, juge t il.

L’accoutumance viendra à la fin d’une journée de pratique dorénavant je serai réglée comme un métronome. 

A mon grand soulagement, le Maître a décidé de varier les instruments. Il étrenne même un martinet qu’il vient de fabriquer. Atypique, le cuir est roulé à la base, s’évasant sur le sommet. La surface d’impact, dense, englobe quasiment une fesse. Cet objet pourrait ressembler à l’ustensile qui sert à battre les tapis pour le son produit.

Ce rituel est puissant, épuisant, grisant.

Nous continuons à travailler les cordes où d’ailleurs une séquence particulièrement esthétique m’emporte par sa puissance. Un peu de cire, un peu de liquide doré et des impacts toujours des impacts…le déroulement de nos journées intensives se poursuit, avec des pauses si protectrices de la cage. Ce week end allait adopter un rythme semé de pics et justement, mon Maître m’explique que je vais tester ses dernières emplettes.

J’avais entrevu ce carton suspect dans le coffre de la voiture qui m’angoisse depuis. Je l’avais repoussé dans le coin de mon esprit jusqu’à cette minute.

Cette fois ces liens seront hostiles.

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